Un court qui cartonne à l’international (Baba Sifon, 2019). Un long à sortir cette année (Santyé papangèr, 2020) L’organisation d’un nouveau festival « Court Derrière » à La Réunion… Une actu chargée pour un Laurent Pantaléon qui fait partie de ces réalisateurs engagés et profondémment ancrés sur leur territoire. Il y a quelques semaines, nous vous annoncions la sortie de son premier film sur www.oi-film.com. le cinéaste revient donc sur « La face cachée du père Noël », un court qui en dit long sur la vision que porte Pantaléon sur la société ici, à l’île de La Réunion et au delà ! Un hommage à ces « hommmes debouts », ceux qui ne se contentent pas d’attendre pour se bouger, « les marrons d’aujourd’hui ».
Pourquoi avoir choisi le thème de Noël pour ce film ?
Je répondrais par d’autres questions : pourquoi fêtons-nous Noël ? Pourquoi en fin d’année à l’école, le père Noël vient-il offrir des cadeaux à mes enfants ? Pourquoi Noël est placé en décembre alors qu’on a déjà la fête Kaf ?
Le message en toile de fond dépeint la société réunionnaise, qu’est-ce que vous avez voulu dire à travers cette histoire ?
Je ne sais pas si ce message est spécifique à la société réunionnaise, je pense qu’il s’agit là d’une histoire universelle. Par exemple, après la projection de « La face cachée du père Noël » au Maoré Film Festival à Mayotte, nombreux sont les spectateurs qui m’ont dit qu’ils voient depuis leur départementalisation, fleurir des 4X3 en fin d’année à l’effigie de l’homme à la cheminée. On est bien là dans une volonté d’imposer « la mondialisation de l’idée », le « formatage universel ».
Que représentent ces messieurs qui partent vendre leurs animaux en ville ?
L’homme debout… Ceux qui ne se contentent pas du RSA, ceux qui ont décidé de vendre les choses qu’ils produisent, quitte à être taxés de travailleurs au noir. Ces hommes debout sont les marrons d’aujourd’hui.
Est-ce que ces modes de vie existent encore de nos jours ?
Mon long-métrage « Santyé papangèr », qui sort en 2020, parle de ces hommes d’aujourd’hui, ceux qui sont derrière le rideau de cannes, ceux que beaucoup ne voient pas, parce que sans doute aveuglés par le père noël et ses cadeaux.
On ressent quand même une certaine nostalgie d’une époque révolue, je me trompe ?
Je suis dans le temps présent, on ne peut pas être nostalgique du temps présent. Je n’ai jamais acheté de poisson dans un supermarché. À des amis pêcheurs, j’achète un espadon entier au même prix que trois tranches dans une grande surface. Vous vous trompez …
Le film a fait le tour du monde, quelle image pensez-vous que le monde justement porte sur le cinéma de l’océan indien ?
Grâce au cinéma malagasy, les cinéphiles savent qu’il y a un cinéma de qualité dans l’océan Indien. Je tente d’atteindre le niveau des cinéastes malagasy… Mais il y a encore du chemin.
Baba Sifon rencontre un franc succès, où est-il aujourd’hui ?
Le film a déjà fait une trentaine de festivals partout dans le monde mais surtout il a été présent à deux festivals de 1ère catégorie : Villeurbanne et le Fespaco. En 2020, il a déjà une programmation établie dans des festivals internationaux, par exemple au « The South African International Festival » à Johannesburg.
Un petit mot sur la première édition du festival Court Derrière, quel bilan faîtes-vous et est-ce qu’il reviendra l’année prochaine ?
Avec l’association Klaxon et le collectif Cinémawon, le festival aura d’abord un écho tout au long de l’année par des projections de films sud-sud suivies de sobatkoz et de ronkozé. Nous travaillons d’ores et déjà sur une seconde édition, en toute simplicité.