Dans son film “La Réunion : terre d’asile ou terre hostile ?”, le réalisateur Saïd-Ali Said Mohamed apporte une réflexion sur l’immigration et l’intégration des Comoriens à La Réunion. Dois-je abandonner ma culture pour m’intégrer ? Pourquoi ce rejet ? Le cinéaste nous en dit plus.
Saïd-Ali Said Mohamed est un réalisateur “à la fois de La Réunion, de la France métropolitaine mais aussi des Comores”. Il fait ses études à l’Institut de L’images de l’Océan Indien à La Réunion, avant de participer à l’université d’été de la Fémis, à Paris. Aux Comores, il monte avec des amis le festival international du cinéma des Comores et sa boîte de production.
“La Réunion : terre d’asile ou terre hostile ?” est une continuité de son premier film, “L’autre Rwanda”. “Rwanda est un quartier au Port où il y a un bidonville que je traversais tous les matins pour aller en cours. Des Comoriens et des Mahorais y habitent. Ils ont été mis à l’écart car ils ne trouvaient pas de logement. Moi, je suis né en métropole et j’ai grandi là-bas. Je suis arrivé à La Réunion en 2003. Le premier jour, quand je suis parti à la FAC, j’ai vu des graffitis où il était écrit “Comoriens dehors”. En échangeant avec les autres Comoriens, je me suis intéressé à l’immigration et à l’intégration des Comoriens à La Réunion”.
Propos recueillis par Céline Latchimy-Irissin.
OI>Film : La Réunion, terre de vivre-ensemble. Mythe ou réalité ?
C’est une réalité. Mais je pense que comme partout ailleurs, on ferme la porte aux derniers arrivants. Les communautés vivent en parfaite harmonie à La Réunion mais il y a des Malgaches, des Mahorais, des Comoriens qui sont mal vus sur l’île. Il faut aussi se demander pourquoi est-ce qu’ils sont mal perçus ? Il y a forcément une raison. Après, on parle d’intégration et d’assimilation. Mais est-ce que je dois, en tant que Comorien ou Malgache, abandonner ma culture pour m’intégrer ? Il y a un problème qui est loin d’être résolu aujourd’hui.
OI>Film : Avez-vous personnellement vécu ce rejet ?
Je n’ai jamais eu de problème. Il y a des clichés autour des Comoriens : il est petit, parle fort, s’assoit par terre… Moi, je fais 1m89. On ne me prenait pas pour un Comorien. Certains croyaient que j’étais Antillais, d’autres, Réunionnais.
OI>Film : Que faudrait-il faire pour que les choses changent ?
La plupart des gens à La Réunion qui sont hostiles envers les derniers arrivants ce sont ceux qui sont dans la même situation sociale que ces personnes. Tant que l’on ne va pas comprendre, que ce soit au niveau des aides sociales ou du monde du travail, que c’est une question de compétences ou de chance, on ne va pas s’en sortir. Je reprendrai les propos d’un protagoniste de mon film qui disait que si un jour il y a un problème à La Réunion et que les Réunionnais sont dans l’obligation de partir ; comment seront-ils perçus par leur supposée terre d’accueil ? Il faut se mettre à la place de l’autre.