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“Résurgence Commode” de Guillaume Levil : un court métrage sur la liberté

À l’occasion de la sortie du court métrage de fiction “Résurgence Commode” sur OI>Film, son réalisateur, Guillaume Levil, a répondu à nos questions.

Interview réalisée par Céline Latchimy-Irissin.

“Résurgence Commode” est un court métrage de 17 minutes sur la liberté. Guillaume Levil, a accepté de revenir sur la construction de son film, sa production, son tournage… Et de nous dévoiler l’envers du décor de son court.

OI>Film : Où “Résurgence Commode” a été tourné ? Combien de temps a duré le tournage ?

Résurgence Commode a été tourné en Provence. Il faut savoir que j’ai passé mon enfance jusqu’à 12 ans à La Réunion puis je suis allé en Provence pour le collège et le lycée. Les deux endroits dont je me sens apte pour faire des films, c’est à La Réunion et en Provence. Celui-là il a été fait en Provence et on a tourné pendant 5 jours.

OI>Film : De quoi parle ton film ? On a l’impression qu’il parle de plusieurs choses : l’homosexualité et la liberté.

La thématique principale c’est la liberté et ça ne parle pas d’autre chose. Après il y a des thématiques secondaires mais elles sont bouffées par celle-là. C’est un truc qui m’a toujours fasciné. Je me suis rendu compte un jour qu’être libre était un peu compliqué dans notre civilisation. Mais le thème c’est la liberté. Ça pourrait parler de féminisme aussi, car c’est une femme qui se libère, ça pourrait parler d’homosexualité… Mais pour moi, [Résurgence Commode] ça parle pas vraiment de ça parce qu’être une femme ou être homosexuel, ce sont des choses qui ne sont pas spéciales pour moi. Quand je rencontre quelqu’un et que je commence à lui parler, intellectuellement je me rends compte beaucoup plus tard que c’est une femme, ou que c’est un garçon ou qu’il est homo… Ça ne m’intéresse pas de prime abord car tout simplement, pour moi, ce n’est pas un sujet car c’est la normalité. 

Alors évidemment quand tu veux traiter de la liberté, tu te sers d’outils. Et moi l’outil narratif, c’est une femme qui est complètement enfermée dans une vie du quotidien, donc c’est l’inverse de la liberté, qui un jour découvre l’homosexualité de son mari. Et ça, c’est un élément déclencheur pour aller chercher la liberté. Mais finalement, ça ne parle pas de l’homosexualité, qui est juste un outil dans la narration pour créer un élément déclencheur. Ça parle de liberté, de la libération et du fait qu’on ne se rend peut-être pas compte des fois, mais en fait on est emprisonné, et elle [Anne] dans sa vie, vient un moment où elle se libère. Il y a tous les personnages qu’il faut : elle, elle se libère petit à petit, elle évolue au fur et à mesure du film mais sinon elle rencontre une jeune fille qui elle, est déjà libérée. C’est un peu son mentor. Le personnage de la barman qui est un peu bizarre, c’est un peu le cerbère, symboliquement, c’est un peu la gardienne de la liberté absolue.

Résurgence Commode de Guillaume Levil, image extraite du film Photo extraite du film : Anne et son « mentor »

OI>Film : Pourquoi avoir décidé de le traiter de cette façon (la comédie) ?

Ce film fait un peu partie d’une trilogie si j’ose dire. Un jour, je me suis retrouvé à consoler une copine qui devait subir une IVG. Je me suis dit, les filles quand même, c’est pas pareil que les garçons, va falloir que j’en parle. Alors j’ai fait ce film, « Résurgence Commode », sur l’espèce de liberté qui est souvent illusoire dans notre société. Anne c’est une femme mûre, qui s’aperçoit que pendant 50 ans elle a été dans un carcan. 

Sinon après, j’ai fait un documentaire qui s’appelle “Le problème du pantalon” (à voir prochainement sur notre plateforme VOD OI>Film), et ça parle de contraception masculine. Un documentaire de 52 minutes qui est une comédie aussi. Ça paraît bizarre pour un documentaire mais voilà, il y a des gens qui rigolent. 

Et le dernier de la trilogie c’est “Courir toute nue dans l’univers”, (à venir également sur notre plateforme), une comédie aussi. C’est l’histoire d’une femme d’une vingtaine d’année qui elle, est complètement broyée par la société et du coup décide de voler des enfants. Elle a un tel besoin d’enfanter parce que la société lui dit qu’une femme doit enfanter, qu’elle décide d’en voler. 

Dans les trois films, ça parle de la même chose : la liberté, du choix d’être une femme dans les trois films, ou alors sur la contraception masculine, un geste un peu féministe que de se contracepter en tant que garçon. 

Mais à chaque fois, sous la pression de la société, c’est un peu difficile parce qu’il y a les sujets tabous et la pression de “tu dois faire des enfants, tu dois faire une famille même si t’es malheureuse” etc. Alors pourquoi les trois films en question sont de la comédie ? C’est très simple c’est parce que pour moi, traiter d’un sujet tabou, ça veut dire qu’il faut le désacraliser. Le but, c’est qu’en sortant de « Résurgence Commode », on se dise “bon ben finalement, j’étais peut-être un peu homophobe mais en fait c’est n’importe quoi, j’ai pas à être homophobe” ou “j’ai pas à juger les gens qui sont un peu libertins, ou libres, ou qui se retrouvent tout nus dans un champ avec les moustaches… Je n’ai pas à les juger car finalement j’ai rigolé” et donc ça a désacralisé le sujet. 

Pareil pour “Courir toute nue dans l’univers” et “Le problème du pantalon”. Il faut en rire. Pour la contraception masculine je suis tombé sur un tel tabou incroyable que ça a été difficile de faire le film. Et je me suis dit, si je ne prend pas le ton de la comédie, de légèreté, et presque un peu de naïveté, je ne vais pas servir mon propos de désacralisation. Après, je ne sais pas si ça a marché. Je ne sais pas si tous les gens qui ont vu Résurgence Commode vont courir tout nus dans un champ, mais j’aimerai bien. 

OI>Film : Comment a été financé le film ?

Il y avait un producteur, Florent Guimberteau avec sa boîte de prod. Les boîtes de production, leur travail à eux c’est de trouver de l’argent. Et c’est lui qui nous a aidé. C’était le conseil départemental des Alpes de Haute Provence, là où on a tourné, qui nous a pas mal aidé financièrement, avec la mairie de Digne-les-Bains. 

OI>Film : Parle-nous du décor.

Digne c’est une petite ville de 17 000 habitants. Il y a quelque chose, qui, je l’espère, ne se voit pas… En fait, pour trouver une boîte de nuit qui fasse un peu gay, avec des trucs roses de partout, des lumières… C’est compliqué. 

C’était difficile de tenir avec le si peu de subventions obtenues parce qu’il a fallu refaire l’intégralité du bar, étant donné que l’on a tourné dans une petite ville où ce type d’endroit n’existait pas. La cheffe déco, Séverine Aubert, a dû tout créer avec par exemple la façade du “Two-two” avec les lumières, et ensuite l’intérieur. Elle a refait tous les murs, elle a mis du rose de partout, elle a fait les statues que l’on voit à l’intérieur : elle les a sculptées avec du polystyrène. J’avais une idée assez précise de l’intérieur. Pour moi, l’intérieur c’est un peu le “Alice aux pays des merveilles” qui rentre dans un truc complètement [bizarre]. Et cet univers-là a été recréé. Et elle s’en est bien sortie.

Photo lors du tournage du film de Guillaume Levil, Résurgence Commode

OI>Film : As-tu des anecdotes de tournage à nous partager ? 

Il y a une scène où il y a des gens tout nus, avec une quarantaine de figurants tout nus. Alors déjà, il a fallu dire à l’équipe, que s’ils ne servaient à rien, qu’ils partent, ou alors qu’ils restent, mais tout nus aussi. Bon, il y a des gens qui n’ont pas voulu. Moi pour donner l’exemple, je me suis mis tout nu aussi. Et il y avait ma mère sur le tournage parce qu’elle voulait faire figurante. On a des liens complètement normaux avec ma mère, il y a de l’amour maternel. Mais c’est vrai que se retrouver tout nu avec sa mère dans un champ, c’est pas courant. Donc j’ai décidé d’aller encore plus loin, et la scène commence avec ma mère et moi qui courons tout nus à travers le champ. Et là, c’est vraiment se mouiller. Comme je voulais parler de liberté, courir avec sa mère dans un champ, tout nus, je crois que c’est le paroxysme de la liberté.

OI>Film : des projets à venir ?

Quand on est auteur, en un instant T, tu as dix projets. Sur les dix projets, si tu as de la chance, il y en a cinq qui vont se réaliser un jour, car en général c’est plutôt trois sur dix. Donc il y a toujours des projets. J’ai un projet de documentaire qui porterait encore sur la liberté des filles lié entre autres à la poitrine libérée ; ça, ce serait le prochain documentaire. 

Ensuite, au niveau du long métrage, j’aimerais bien que le prochain soit entièrement tourné à La Réunion. On a déjà la chance d’avoir l’aide de la Région Réunion sur ce projet alors j’espère que ça va le faire, surtout avec ce virus… J’aimerais bien tourner en août, et si c’est pas le cas, ce sera après. Enfin, on verra. J’avais tourné un film que vous avez diffusé, « Arthur Rambo« . C’est un peu la version longue de « Arthur Rambo », qui est toujours basée sur une anecdote de mon enfance quand j’habitais à La Réunion, mais en long métrage et avec beaucoup de poésie. C’est la version onirique. Et ça, ce serait le long métrage qui s’appellerait “Un arbre”. 

Et j’aimerais bien tourner un court métrage en Bretagne aussi, mais ça, on verra.

 

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Céline Latchimy
Céline Latchimy
Journaliste, rédactrice, elle s'intéresse à toute l'actualité de la Réunion et des îles de l'OI
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