Médecin urgentiste à Mayotte, Valérie Thomas a co-écrit et co-réalisé la série Chababi Project aux côté de Delixia Perrine. La première saison compte six épisodes et a été diffusée d’abord à Mayotte sur la télé locale puis sur Mayotte 1ère et France Ô. Chababi Project raconte le quotidien d’une bande de jeunes inscrits dans un lycée spécialisé dans les arts de la scène. La danse et le théâtre sont ici utilisés comme des vecteurs pour aborder des thèmes sensibles sur le 101ème département français. Valérie Thomas à l’orgine de ce projet nous raconte.
Chababi Project est une série mahoraise, y-a-t-il d’autres séries tournées et réalisées à Mayotte ?
Une jeune et talentueuse auteure et productrice à Mayotte, Jacqueline Guez-Djoumoi a sorti la jolie série « Askip » en 2019 sur les thématiques de santé sexuelle, et nous a dit récemment que « Chababi Project » avait ouvert la voie, avait été précurseur sur ce type de format. Pour nous c’est un des plus beaux retours !!! Et oui, on a l’impression que, depuis, de nombreux projets émergent, notamment portés par les anciens Chababis que ce soient les technicien.nes ou les comédien.nes. Mayotte est dans la place !
Où et quand « Chababi Project » a t elle été diffusée ?
« Chababi » a été initialement diffusée sur une chaîne locale en 2018, Kwezi TV puis par France télévision à la suite du prix Urban Film Festival 2018 sélection Outre-Mer donc sur Mayotte la 1ère et France Ô en 2019.
Que veut dire Chababi ?
Jeunes, Jeunesse, le titre a été choisi par les acteurs et actrices. Ça parle d’eux, les Chababis, à Mayotte, leurs espoirs, leurs aventures, leur réalité.
Qu’avez-vous souhaité dire à travers cette série ?
Nous voulions, collectivement, avec l’équipe de comédien.nes et les activistes mahoraises, à l’origine du projet, aborder un certain nombre de sujets difficiles. Parler de violences faites aux femmes, aux jeunes, mais en montrant que des solutions pour s’en sortir existaient aussi à Mayotte, donner de l’espoir et des pistes. Nous voulions aussi montrer le talent de ces jeunes qui dansent et jouent la comédie dans des endroits impossibles : sur les plateaux de sports en mauvais état, dans des MJC délabrées et que malgré tout, ils/elles ne renoncent jamais à leurs rêves et possède une identité métissée, forte, à part, en pleine évolution.
Pourquoi avoir choisi des lycéens et la danse pour véhiculer ces sujets ?
Je ne sais pas qui a choisi qui ! Ce projet a émergé à leur contact, grâce à la rencontre d’une troupe de théâtre amateur de jeunes, Mlézi, et grâce aux danseurs de la scène hip-hop à Mayotte et aux Comores qui est incroyable. Tous et toutes méritaient d’être vu.es
Pourquoi avoir choisi Mayotte comme théâtre de cette série ?
Je travaille en tant que médecin urgentistes à Mayotte depuis 2014 et j’y suis confrontée, depuis 5 ans à de nombreuses histoires de vie difficiles, qui m’ont conduit à mener une enquête sur les sujets abordés dans Chababi. Et Mayotte est une île d’une beauté incroyable qu’on ne voit pas assez souvent sous son meilleur jour ! Et enfin, c’est un endroit où plusieurs cultures se sont enchevetrées, un mélange inédit.
Comment s’est déroulé le casting ?
300 jeunes comédien.nes amateurs ont été auditionnés dans toute l’île avec la collaboration d’une des deux troupes de théâtre professionnelle de Mayotte, la compagnie Stratagème. Nous avons rencontré toutes les troupes de théâtre amateurs qui le souhaitaient, vu toutes les classes de théâtre dans les collèges, lycéees universités. Et environ 200 danseurs/danseuses ont été auditionnés avec le chorégraphe comorien de la série, Salim Mzé Hamadi Moissi, en collaboration avec l’association Hip Hop Evolution.
Est-ce qu’il y aura une saison 2 ?
Nous aimerions beaucoup !!!! Mais avec Delixia Perrine co-auteure, co-réalisatrice et comédienne dans la série, et Dominique Baldé à la production, on aimerait laisser la barre aux Chababis… Mais une piste de collaboration se dessine
Un mot sur votre actualité ?
La diffusion de Chababi sur OI>FILM déjà ! La sortie d’un DVD « Chababi Project » avec un livret pédagogique pour celles et ceux qui souhaitent le diffuser dans des milieux éducatifs, parce que nous avons déjà expérimenté à Mayotte, La Réunion et l’Hexagone : Chababi est un outil qui marche pour l’éducation à l’image mais aussi pour aborder les sujets sensibles qui y sont traités. Et enfin, nous travaillons au développement d’un dessin animé mahorais, là aussi une belle collaboration en perspective…J’espère que vous aurez des nouvelles en 2020 !