“Être Vahaza”, un film tourné à Madagascar et sorti en 2017, dans lequel Philippe Gaubert nous fait part de ses interrogations sur les vazaha.
“Je suis né à Marseille et je suis arrivé à La Réunion en 1990. J’ai commencé la photo en 1991 avec Gilbert Albany, photographe”. Philippe Gaubert est également réalisateur. “Être vazaha”, un autoportrait, mais pas seulement. Le cinéaste se livre sur son film intimiste.
Interview réalisée par Céline Latchimy-Irissin.
OI>Film : Quelles étaient tes intentions ?
15 ans que je vivais à Madagascar. Je suis un “vazaha”, c’est-à-dire un étranger. Toute notre vie on est vazaha, même si on parle la langue, qu’on est marié à une malgache, qu’on a des enfants métisses. Je me demandais pourquoi on (les vazaha) est là, pourquoi on y reste ? J’ai filmé des gens que je connaissais, y compris ma femme, car il me semblait important d’avoir le regard d’une malgache qui vit avec un vazaha.
OI>Film : Peut-on dire que ton film est un autoportrait ?
Oui, car c’est aussi mon histoire. On voit mes enfants et ma femme qui parlent de moi. C’est un film intimiste sur mon identité et ma relation avec une femme malgache. Mais pas seulement, car il y a d’autres vazaha qui sont là pour apporter une autre vision de la relation malgache-étranger.
OI>Film : Comment s’est passé le tournage ?
J’ai écrit ce film en 2013 et il est sorti en 2017. C’était un peu long car j’ai voulu tout faire moi-même. C’était compliqué surtout en termes techniques : au niveau du son, et puis mes plans faisaient 3 à 4 secondes. Au montage, je me suis un peu fait tirer les oreilles. J’ai dû apprendre ce qu’était le cinéma.
OI>Film : Les malgaches distinguent deux types de vazaha. En tant que vazaha, quel regard as-tu sur ceux qui profitent ?
A Madagascar, pour 30 euros par mois tu peux avoir un employé. Il y a des gens, ça leur monte vite à la tête. Pour parler un peu des Réunionnais, que j’adore, 95 % de ceux qui vont à Madagascar, ce sont des gens qui, humainement, ne se comportent pas très bien parce qu’ils ont un espèce de pouvoir de supériorité. A un moment, j’ai voulu filmer ces vazaha qui ne sont pas des gens biens. Mais j’ai vite oublié cette idée car c’est difficile de filmer des gens avec qui on n’a pas d’empathie.
OI>Film : As-tu des projets en cours ?
J’ai deux projets dont un à La Réunion qui me tient particulièrement à cœur. Je suis arrivé à La Réunion dans les années 90 à un moment charnière des arts plastiques et de la culture, où il y avait une certaine volonté politique de mettre en place une identité culturelle : mise en place d’infrastructures, expositions… La question de ce film c’est : 30 ans après, où en est-on au niveau des arts plastiques et de l’identité culturelle réunionnaise ?
Ensuite, j’ai un projet à Madagascar, écrit lors d’une résidence. C’est autour des enjeux entre la relation homme-plante. Il y a des plantes qui font du lien social, qui soignent, qui sont utilisées dans la sorcellerie…